In Memoriam Ti Manno – 13 mai 1985 / 13 mai 2025

 

In Memoriam Ti Manno – 13 mai 1985 / 13 mai 2025

40 ans après, la voix du peuple résonne encore

Quarante ans après sa disparition prématurée, Ti Manno, de son vrai nom Antoine Rossini Jean-Baptiste, demeure une figure inaltérable de la mémoire musicale et sociale haïtienne. Porte-parole des oubliés, poète du peuple, voix engagée d’une génération éveillée, Ti Manno n’a jamais quitté le cœur des Haïtiens.

Né à Gonaïves en juin 1953, il monte sur scène dès l’adolescence. De Super Star à Shupa Shupa, des Fantaisistes de Carrefour à Volo Volo de Boston, DP Express et enfin Gemini All Stars (qu’il fonde en 1981), il bâtit une carrière météorique, ponctuée de succès retentissants et d’un engagement rare. Dans ses textes, il dénonce les injustices, les hypocrisies sociales, la misère, la corruption. Il fait de la musique un espace de résistance, un outil d’éducation populaire, un levier de dignité.

Comme le soulignait Gérard Merceron :

« Le petit peuple a fait de Ti Manno le porte-parole de ses revendications. Chaque génération a besoin de héros. Celle-ci en a trouvé un. »

Et c’est bien ce rôle de héros populaire qu’il incarne jusqu’à son dernier souffle. En 1983, alors qu’il triomphe lors du festival d’été, la maladie le frappe. Installé à New York, Ti Manno est hospitalisé en urgence. Le diagnostic est sombre. Mais la mobilisation est immense. Producteurs, fans, membres de la diaspora lancent l’Operasyon Men Kontre, une vaste campagne de solidarité qui permet de recueillir plus de 15 000 dollars pour ses soins.

Malheureusement, le 13 mai 1985, à seulement 32 ans, Ti Manno s’éteint à l’hôpital Mount Sinai Morningside (alors Centre hospitalier St. Luke-Roosevelt) à Manhattan. Il laisse derrière lui un vide immense, un peuple orphelin et une œuvre immortelle. Ses obsèques, chantées sous une pluie de prières et de musique, se tiennent à Brooklyn, à l’église St. Mathen. Il repose depuis au cimetière de Calvary à Queens (section 10, plot block 97, tombe 17).

Son décès fut un choc. Sa mémoire est un appel.

Aujourd’hui, alors que le pays vacille encore dans l’instabilité, les messages de Ti Manno trouvent un écho saisissant. Son œuvre devrait faire l’objet d’un travail de mémoire institutionnel. Un musée de la musique haïtienne, une place publique à son nom, une journée nationale en hommage aux grands artistes haïtiens s’imposent.

Ti Manno n’était pas qu’un chanteur. Il était une voix. Celle du peuple. Celle d’Haïti. Et cette voix résonne encore, 40 ans après. 

Crédit : @ElizePierre