Les Merengue semblent avoir fait un pas en arrière avec le Bondynois dans leurs rangs. Et ils pourraient bien regretter de l'avoir fait venir du PSG.
Le cliché est connu de tous. Un jeune Kylian Mbappé est assis sur son lit, adossé à un mur, entouré de photos de Cristiano Ronaldo. Ici, Ronaldo contrôle le ballon de la poitrine, là, Ronaldo brandit le Soulier d'or. Et sur chacune d'entre elles, Ronaldo est vêtu du blanc du Real Madrid.
À l'époque, il s'agissait d'une photo innocente d'un enfant qui aimait le football. Mais depuis, il est devenu le symbole de quelque chose de plus grand. Depuis qu'il est tout petit, Mbappé veut jouer pour Madrid. Cette photo est la preuve parfaite que le transfert estival de l'attaquant français dans la capitale espagnole était écrit à l'avance. Un engagement qui devait finir par se faire.
Mais ce fantasme d'enfant, maintenant qu'il est devenu réalité, est loin d'être une histoire parfaite. Mbappé était censé être la dernière pièce de cette équipe madrilène, le fil du rasoir qui pouvait rendre l'équipe la plus dominante d'Europe presque inarrêtable. La réalité est toute autre.
Les Madrilènes sont désorientés, leurs joueurs ne sont plus tout à fait sur la même longueur d'onde. La fluidité manque, la connectivité n'existe plus. Mbappé, le meilleur buteur de l'histoire du Paris Saint-Germain et l'un des trois meilleurs joueurs du monde, a rendu cette formation moins performante.
Une histoire de flirts répétés
Il est intéressant de réfléchir à la manière dont on est arrivés là. Mbappé a laissé entendre au moins deux fois qu'il voulait jouer pour l'équipe de Carlo Ancelotti, et le premier flirt en bonne et due forme qui a eu lieu en 2022. Madrid était pratiquement convaincu d'avoir obtenu les services de Mbappé sur la base d'un contrat à long terme. Il devait devenir un agent libre et sa relation avec le PSG s'était détériorée. Il semblait même que celui qui avait fait le premier pas envers les Merengue. Mais au lieu de rallier la capitale espagnole, l'attaquant français a pris la décision surprise de signer à nouveau à Paris.
Les Madrilènes étaient furieux et ont déclaré qu'ils ne reviendraient plus jamais sur Mbappe. La confiance était rompue... Cela a duré moins de 12 mois. À l'été 2023, Mbappé a clairement fait savoir qu'il ne signerait pas un autre contrat avec le PSG, et qu'il ne déclencherait même pas la prolongation d'un an que le club français pensait assurer pour lui permettre de rester jusqu'à la fin de la saison à venir. C'était en quelque sorte un message : "Venez me chercher, M. Perez".
Madrid n'a pas mordu à l'hameçon. Le PSG a accepté une offre massive d'Al-Hilal, club saoudien de Pro League, pour les services de Mbappé, mais ce dernier ne l'a même pas envisagée. Madrid, quant à lui, s'est adapté et s'est réorganisé. Karim Benzema est parti et Ancelotti a déployé Jude Bellingham en tant que faux neuf. Les Merengue remportent la Liga et la Ligue des champions avec beaucoup de panache.
Mais au printemps, on savait que Mbappé allait devenir un joueur madrilène. La seule question qui restait était de savoir combien il était prêt à céder au PSG pour que tout le monde y trouve son compte. Les conditions n'ont jamais été divulguées, mais Mbappé a passé les derniers jours de son séjour parisien sur le banc de touche, en attendant son transfert.
Une bonne première impression
Lorsque cela s'est finalement produit, le transfert de Madrid s'est fait à leurs conditions. Fini le contrat mirobolant qui prévoyait des salaires sans précédent et le contrôle des droits à l'image de Mbappé, qui ne ferait plus exploser leur structure salariale. Au lieu de cela, son salaire s'alignait sur celui de Bellingham (bien qu'une prime à la signature de 150 millions d'euros lui a été généreusement accordée.
Sa cérémonie de présentation, devant un Santiago Bernabeu plein à craquer, ressemblait beaucoup à celle organisée pour Ronaldo 15 ans plus tôt. Mbappe a même tenu un discours comparable, et a apporté la même énergie alpha, ceui d'un gars cool, "regardez moi". Mbappe était là, et tout le monde devait le savoir.
Du côté des Blancos, on n'a dit que du bien. Ancelotti a fait part de son enthousiasme, tandis que plusieurs joueurs ont posté sur Instagram pour lui souhaiter la bienvenue dans l'équipe. Les vibrations semblaient bonnes dès le premier jour.
Des signaux d'alerte précoces
Cependant, il est apparu immédiatement que les choses allaient se dérouler plus difficilement sur le terrain. L'inquiétude naturelle était évidente : Vinicius Jr et Mbappé jouent exactement au même poste. Que l'on considère Vini comme un ailier mangeant la ligne de touche plutôt qu'un attaquant intérieur n'a pas vraiment d'importance ; tous deux sont des joueurs offensifs extrêmement talentueux qui évoluent sur le côté gauche et repiquent à l'intérieur. Rodrygo, qui a si volontiers sacrifié ses propres intérêts en jouant à droite la saison dernière, gravite également souvent autour de ce poste.
Bellingham, lui aussi, préfère occuper la moitié gauche de l'espace avant de s'élancer vers le centre. Sur le papier, ce système semble terriblement déséquilibré, ce qui s'est vérifié dans les premières semaines de la campagne. On a fait savoir à Mbappé qu'il devait jouer dans l'axe, mais il a fini par se mettre à son poste de prédilection. Parfois, il se mettait tout simplement en travers du chemin de Vinicius. Il y a eu des sourires et des rires sur le terrain, mais les deux se sont marchés dessus lors du match nul entre Madrid et Majorque en ouverture de l'exercice.
Mais tout cela n'était qu'un problème d'adaptation, du moins c'est ce que l'on nous a dit. Avec le temps, on s'est rendu compte que ce n'est pas trop le cas.
Il expose toute son équipe
Les problèmes offensifs sont peut-être un peu exagérés. Oui, il y a eu des moments difficiles. Lors du Clasico (4-0), Mbappé a été pris huit fois en flagrant délit de hors-jeu face à la ligne haute du FC Barcelone (on aurait pu penser qu'un joueur de ce calibre saurait comment chronométrer une course). Mais si l'on fait un zoom arrière, les chiffres sont bons. Mbappé a inscrit neuf buts en 17 matches, tandis que Vinicius accumule les buts et les passes décisives. Et même si la production de Bellingham a baissé, il s'est adapté pour devenir un numéro 8.
Mais ce n'est pas une bonne équipe de Madrid. Les Merengue ont éprouvé des difficultés face aux meilleures équipes et ont échoué dans des rencontres qu'ils auraient normalement remportées. Cela s'explique en grande partie par leurs problèmes défensifs, et tout commence par le secteur de devant. Dans le football moderne, il n'y a pas de de relâchement possible, surtout face à des équipes dont la qualité offensive est telle qu'elles peuvent vous mettre en pièces. Les excuses sont inutiles ; défendre à onze est obligatoire.
Les Madrilènes avaient déjà quelques problèmes dans ce domaine, le rythme de travail de Vinicius étant souvent discutable. Celle de Mbappé, en revanche, est inexistante.
Il y a des règles de base qui ne sont pas respectées. Quand Madrid perd le ballon, Mbappé ne baisse pas la tête et ne presse pas. Les couloirs de passes sont laissés ouverts et les adversaires ont beaucoup trop de temps pour s'organiser et lancer leurs offensives. De nos jours, il existe une formule facile pour jouer contre Madrid : faire passer le ballon au numéro 6, et faire des passes sur la largeur du terrain. C'est ainsi que Barcelone et l'AC Milan ont démantelé les Madrilènes.
En tant qu'attaquant axial, c'est à Mbappé d'empêcher cette petite passe. Il n'essaie même pas de le faire, ce qui expose le reste de l'équipe.
Un body language inquiétant
Aujourd'hui, il est impossible, à travers un écran ou même dans les tribunes, de savoir exactement ce que pense un footballeur. Et le soin que les athlètes ont tendance à apporter à leurs paroles sur le terrain est tel - on voit régulièrement des joueurs se couvrir la bouche lorsqu'ils parlent, sans raison apparente - qu'il est difficile d'avoir un véritable aperçu de leurs véritables pensées.
Mais les gestes en disent long. Bellingham a clairement fait savoir qu'il n'était pas satisfait de Mbappé ou de Vinicius. Il a régulièrement été vu en train de leur crier de presser. Contre Lille, lors d'une défaite 1-0 en Ligue des champions, il les a pratiquement réprimandés pour avoir refusé de défendre en fin de match. D'autres ont fait de même : Rodrygo a jeté les bras en signe de frustration, tandis qu'Aurélien Tchaoumeni a lui aussi manifesté son mécontentement.
Ancelotti, pour sa part, a insisté sur le fait qu'il n'y avait rien d'anormal dans le vestiaire madrilène. C'est peut-être vrai, mais on peut se demander combien de temps cela va durer si la recrue à gros budget continue à ne pas faire son travail.
Liverpool verni de ne pas l'avoir signé ?
Il existe, bien sûr, un univers footballistique parallèle dans lequel Mbappé n'est pas un joueur madrilène et aurait plutôt signé avec Liverpool, l'adversaire de mercredi en Ligue des champions. Le joueur lui-même a confirmé que les Reds avaient fait une approche, mais les discussions n'ont jamais été concrètes.
Mais dans cette étrange hypothèse, il est facile de voir comment les Reds auraient pu éviter une sérieuse source de problèmes, surtout sous la direction du nouveau manager Arne Slot. La carte de visite du manager néerlandais est peut-être son football axé sur la possession, mais son véritable objectif pour cette équipe a été la solidité défensive. Si l'équipe est si bonne en ce début de saison, c'est en partie parce qu'elle défend très bien. Mbappé n'aurait tout simplement pas sa place au sein de la formation de Mersey.
Une opportunité inouïe de briller
Le match étant le plus prestigieux de toute la phase de championnat de la Ligue des champions, Mbappé aura à cœur de faire le spectacle contre Liverpool et d'essayer de mettre fin aux histoires qui l'entourent depuis qu'il est apparu pour la première fois dans une équipe madrilène. Les Madrilènes ont en effet besoin de lui pour se qualifier pour les huitièmes de finale, après deux défaites lors des quatre premières journées, et pour défier dans de bonnes conditions l'Atalanta, invaincu, après le déplacement à Anfield.
Et, manque de bol pour les Madrilènes et les téléspectateurs, l'occasion est peut-être donnée à Mbappé de retrouver son meilleur niveau. Vinicius manquera le match de mercredi en raison d'une blessure et devrait être absent pendant les trois prochaines semaines pour se rétablir. En théorie, cela signifie que Mbappé devrait avoir l'espace nécessaire pour montrer son meilleur visage et gagner en confiance avant le retour du Brésilien. Il est évident que les deux joueurs se retrouveront un jour ou l'autre et qu'ils devront à nouveau surmonter leurs problèmes de complicité, mais c'est l'occasion pour Mbappé de clore le premier chapitre de son histoire madrilène sur une note plus positive.
Si Mbappé ne parvient toujours pas à s'imposer sans Vinicius sur le terrain, on commencera à se poser des questions. L'équipe madrilène du Galactico du début des années 2000 n'a pas remporté le nombre de trophées que l'on attendait d'elle, et l'on craint de plus en plus que l'histoire ne se répète à Bernabeu. Pour que ce ne soit pas le cas, Mbappé doit accepter tous les aspects de son nouveau rôle et s'ouvrir à l'idée qu'il n'a pas besoin d'être l'homme de base chaque semaine. Pour l'instant, même s'il reste l'un des meilleurs au monde, ce transfert ne vaut pas toutes les difficultés que Madrid a dû surmonter pour le réaliser.
Crédit: Thomas Hindle et Naim Beneddra
%20(2).jpeg)
%20(1).jpeg)
.jpg)
.jpg)
.jpg)
