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lundi 3 février 2025

Le cancer de la prostate tue en silence en Haïti


Le cancer de la prostate tue en silence en Haïti, le Dr Mane Ricot Félix tire la sonnette d’alarme

Le cancer de la prostate est une maladie qui fait des ravages à travers le monde, selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Considéré comme le deuxième cancer le plus fréquent chez les hommes, il constitue une menace silencieuse, notamment en Haïti, où il est responsable de nombreux décès. Une étude menée par des urologues haïtiens, dont le Dr Mane Ricot Félix, met en évidence l’ampleur de cette pathologie dans le pays.


Un cancer parmi les plus fréquents et mortels


Le cancer de la prostate se caractérise par la formation d’une tumeur maligne au sein des tissus de la prostate, une glande située sous la vessie et entourant l’urètre chez l’homme.


Selon la Société Américaine du Cancer, ce cancer est le deuxième plus diagnostiqué chez les hommes à l’échelle mondiale, après le cancer du poumon. Pour 66 % des pays, il est même classé comme le cancer masculin le plus fréquent. Chaque année, on estime que 1,5 million d’hommes reçoivent un diagnostic de cancer de la prostate.


Cette maladie représente également la cinquième cause de décès par cancer chez les hommes dans le monde, avec environ 1,4 million de nouveaux cas et 375 304 décès en 2020.


En 2022, il s’agissait du cancer masculin le plus fréquemment diagnostiqué dans 118 des 185 pays étudiés, notamment aux États-Unis, au Brésil, dans les pays scandinaves, au Royaume-Uni, en France et en Australie.


Selon l’Observatoire mondial du cancer (GCO), le cancer de la prostate figurait parmi les dix types de cancers représentant les deux tiers des nouveaux cas et des décès dans le monde en 2022, avec 1,5 million de cas, soit 7,3 % du total.


Un cancer touchant principalement les personnes âgées


L’âge avancé constitue le principal facteur de risque du cancer de la prostate. Son incidence augmente considérablement après 50 ans, et environ 1 homme sur 7 est atteint à 70 ans, selon la Fondation pour la recherche sur le cancer.


Cependant, bien que majoritairement associé au vieillissement, ce cancer peut également toucher des hommes plus jeunes en raison de prédispositions génétiques ou d’antécédents familiaux. Les professionnels de santé exhortent donc tous les hommes à rester vigilants et à consulter un urologue en cas de facteurs de risque ou de symptômes évocateurs.


Des chirurgiens urologues haïtiens révèlent l’ampleur du cancer en Haïti


Le cancer de la prostate est l’une des principales causes de décès chez les hommes âgés en Haïti. Le manque de dépistage et l’accès limité aux soins font qu’il est souvent diagnostiqué à un stade avancé, ce qui complique son traitement.


Une étude menée entre septembre 2020 et janvier 2025 par les chirurgiens urologues Mane Ricot Félix, Joseph Kedex, sous la supervision du Dr Clervile Mitelot, président de la Société Haïtienne d’Urologie (SHU), met en lumière la montée exponentielle de cette maladie. Sur un échantillon de 88 hommes diagnostiqués, plus 50 % sont venus avec un résultat d’histopathologie positif, nous explique le chirurgien urologue Mane Ricot Félix, lors d’une interview exclusive accordée à Passion Info Plus, dans le cadre de la journée Mondiale de la lutte contre le Cancer le 4 février. 


Ce taux élevé, selon lui, reflète à la fois un manque de sensibilisation et des lacunes majeures en matière d’infrastructures médicales et de politiques publiques dédiées à la prévention et au traitement du cancer de la prostate en Haïti.


Un accès limité au traitement


Si de nombreux hommes en Haïti reçoivent un diagnostic de cancer de la prostate, peu d’entre eux bénéficient d’un traitement en raison de leur situation économique précaire et de l’insuffisance de soins urologiques dans les hôpitaux publics, nous confie le PDG de la COPSA (INULACOPSA). 


Le Dr Félix explique qu’en 2023, pendant trois mois consécutifs, aucun de ses patients n’a pu suivre son traitement après avoir été testé positif, faute de moyens financiers.


“Nous avons traité de nombreux cas, mais nous nous concentrons davantage sur le dépistage. Sur des milliers de patients vus en consultation avec suspicion pour une centaine de cancer de la prostate avec PSA élevé et toucher rectal suspect 62.5% % d’entre eux ont apporté un résultat positif après l’examen de confirmation de biopsie de la prostate. 


Troubles érectiles


Selon le co-présentateur de l’émission “Micro santé” à Radio Télévision Caraïbes, le cancer de la prostate peut affecter votre érection, principalement en raison des traitements administrés pour le soigner. Les nerfs responsables de l’érection entourent la prostate et pourraient être affectés lors d’une intervention chirurgicale. Il est donc fréquent qu’une prostatectomie entraîne des troubles de l’érection.


Certaines thérapies, comme la radiothérapie et l’hormonothérapie, peuvent également provoquer des effets secondaires, notamment une diminution de la libido, une dysfonction érectile modifient également le processus d’éjaculation, entraînant une réduction du volume du sperme ou une éjaculation rétrograde (où le sperme est redirigé vers la vessie plutôt que vers l’extérieur), a expliqué le Dr Félix. 


Une maladie silencieuse mais destructrice


Le cancer de la prostate est une maladie qui évolue silencieusement, sans provoquer de symptômes aux premiers stades. Ce n’est qu’au fur et à mesure de sa progression que certains signes commencent à apparaître, selon la Fondation pour la Recherche sur le Cancer. 


D’après l’urologue travaillant au Complexe Médical Éphata, la maladie peut se développer de manière insidieuse, passant inaperçue jusqu’à ce qu’elle ait déjà causé des ravages dans l’organisme. “Vous pouvez être atteint sans jamais le savoir, et lorsque les symptômes apparaissent, le cancer est déjà à un stade avancé. Ce qui réduit considérablement les chances de guérison”, explique-t-il.


À ce stade, des troubles urinaires peuvent survenir, notamment la dysurie, qui désigne des difficultés à uriner. Celle-ci peut être :


• Initiale : difficulté à commencer à uriner,


• Finale : sensation de vidange incomplète de la vessie, avec des gouttes retardataires,


• Totale : diminution de la pression du jet urinaire, pouvant donner l’impression d’un écoulement faible ou interrompu.


Dans certains cas, une hématurie (présence de sang dans les urines) peut également survenir. L’urine, habituellement claire, peut contenir du sang en fin de miction, ou inversement, le saignement peut apparaître au début du jet urinaire. Tous ces symptômes doivent alerter et motiver une consultation urologique rapide.


Facteurs de risque du cancer de la prostate


Selon le Centre de Lutte contre le Cancer, les principaux facteurs de risque sont :


• L’âge avancé : le risque augmente considérablement après 50 ans.


• Les antécédents familiaux : un homme dont un parent proche a eu un cancer de la prostate est plus à risque.


• L’origine ethnique : les hommes d’origine africaine sont plus susceptibles de développer cette maladie. Selon Cussenot. O et Cancel-Tassi. G (2004), les seuls facteurs de risque identifiés avec certitude sont l’origine ethnique et les antécédents familiaux d’un cancer du même type.


Le régime alimentaire peut entraîner un cancer de la prostate. La Fonction pour la Recherche sur le Cancer a souligné également qu’une consommation insuffisante en fruits et légumes, associée à une consommation trop élevée de graisses notamment issues de viande rouge, peut augmenter le risque de développer ce type de cancer. 


Un cancer guérissable s’il est détecté tôt


Le cancer de la prostate peut être guéri si le diagnostic est précoce. Selon le spécialiste en Urologie, plus il est détecté tôt, plus les chances de succès du traitement sont élevées. Lorsqu’il est localisé, il peut être traité efficacement. Cependant, lorsque la tumeur se propage aux organes voisins, le traitement devient plus complexe. Au stade des métastases, il devient beaucoup plus difficile d’éradiquer totalement la maladie.


L’indifférence de l’État haïtien face à cette maladie


L’État haïtien affiche un manque criant de volonté en matière de politique de santé publique pour lutter contre le cancer de la prostate, qui touche pourtant une large frange de la population masculine, constatent ces urologues précités. 


Dans plusieurs pays, la lutte contre cette maladie repose sur des campagnes de sensibilisation, un dépistage systématique et une prise en charge médicale organisée afin de limiter ses conséquences. Pourtant, en Haïti, aucune politique de prévention n’est mise en place. Les citoyens ne sont pas assez informés des risques liés à cette pathologie, et l’absence de programmes nationaux de dépistage rend difficile un diagnostic précoce.


“Le cancer de la prostate n’est pas une priorité pour l’État haïtien”, a scandé sans langue de bois le médecin spécialiste tout en critiquant l’inaction des autorités sanitaires, qui peinent même à assurer des soins de santé primaires, encore moins à mettre en place des mécanismes pour aider les hommes de plus de 50 ans atteints de cette maladie.


Le cancer de la prostate fait partie des maladies les plus mortelles dans le monde. En 2022, 20 millions de nouveaux cas ont été diagnostiqués, et 10 millions de personnes en sont mortes, selon le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).


D’ici 2050, l’agence de l’OMS spécialisée dans cette maladie prévoit 35 millions de nouveaux cas par an, soit une augmentation de 77 %. Le comportement passif de l’État haïtien face à cette maladie représente un enjeu de santé publique majeur. 


Tout en défendant une politique de dépistage et de sensibilisation pour sauver des vies, le chirurgien urologue Mane Ricot Félix encourage les hommes de plus de 40 ans à effectuer un dépistage annuel des maladies de la prostate afin de prévenir ou de traiter toute pathologie potentielle.


Références


1. Cussenot. O et  Cancel-Tassi. G (2004), Facteurs de risque génétiques pour le cancer de la prostate. URL : https://id.erudit.org/iderudit/008424ar  [en ligne]. Consulté le 29 janvier 2025


2. URL : https://www.fondation-arc.org/cancer/cancer-prostate/facteurs-risque-cancer [en ligne], consulté le 30 janvier 2025


3. URL: https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC8888523/ [en ligne], consulté le 31 janvier 2025


4. URL: https://www.cancer.org/research/acs-research-news/prostate-cancer-is-number-1-for-118-countries-worldwide.html [en ligne], consulté le 31 janvier 2025


5. URL : https://www.cancer-environnement.fr/fiches/cancers/cancer-de-la-prostate/ [en linge], consulté le 27 janvier 2025


6. URL : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/cancer [en ligne], consulté le 29 janvier 2025



Crédit : Joseph Marcus

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